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Photo du rédacteurPierre SUAIRE

Il y a 190 ans, le début de la révolte des canuts à Lyon

« Ils ont juré de vaincre ou de mourir. Ils tiendront leur serment » : c’est ainsi que le journal populaire lyonnais La Glaneuse rapporte le soulèvement mené par des ouvriers et petits artisans du textile entre le 20 et le 23 novembre 1831. Retour sur ce contexte social agité.


Dès la fin du XVIIIe siècle, le textile est la principale activité économique et industrielle de la région lyonnaise. Cependant, la situation des artisans tisserands se dégrade en raison des fluctuations de la demande, de la mécanisation du système productif, ainsi que de la concurrence accrue sur le marché de la soie ; les conditions de vie sont précaires pour de nombreux travailleurs, surtout pour les femmes, moins bien payées. En effet, au début du nouveau régime de la Monarchie de Juillet, alors que les espérances sociales de changement sont élevées, les revenus sont près de deux fois inférieurs que lors du Premier Empire.



Ainsi, pour assurer une dignité dans le travail et pour être mieux représentés dans leurs aspirations à une vie meilleure, les canuts sont organisés au sein de structures de solidarités politiques, inspirées par le mutuellisme. En octobre 1831, les canuts obtiennent auprès du préfet du Rhône l’instauration d’un tarif minimum, garantissant une protection face à la baisse des prix. Cependant, les fabricants – autrement dit les propriétaires – s’opposent à ces demandes, défendant le principe de non-intervention de l’État dans les relations de travail et se montrent intransigeants face aux demandes d’augmentation de salaires.


Les canuts, exaspérés par l’inflexibilité des grands négociants, décrètent une grève générale le 20 novembre 1831, qui débouche le lendemain et dans les jours suivants sur une véritable émeute populaire dans les quartiers lyonnais et sur le plateau de la Croix-Rousse. La Garde nationale est chargée de la répression, mais rapidement, rejoint la cause des émeutiers. Un comité insurrectionnel est formé pour conduire le mouvement, mais les ouvriers reprennent le travail, pensant avoir obtenu satisfaction sur le tarif. Des troupes royales sont envoyées depuis Paris pour reprendre le contrôle de la deuxième ville de France, ce qui se fait deux semaines plus tard, malgré la discipline de l’organisation des canuts.


Ces derniers sont vaincus mais cet événement de novembre 1831 est le premier d’une série de soulèvements et de conflits sociaux, considérés comme un moment charnière dans l’histoire du mouvement ouvrier européen.


Pour aller plus loin :


* La Glaneuse : journal populaire, N°47, sur le site des collections de la Bibliothèque Municipale de Lyon ;

* L’Écho de la Fabrique, publication des canuts entre 1831 et 1835, à retrouver en ligne sur le site de l’ENS Lyon ;

* « L’Insurrection lyonnaise de novembre 1831 ; le mouvement ouvrier à Lyon de 1827 à 1835 », Fernand Rude, Anthropos, 1969 ;

* « Intérieurs de canuts », Hélène Delpech, Histoire par l'image, août 2005 ;

* « La révolte des canuts », Hélène Delpech, Histoire par l'image, mars 2016 ;

* « Les Canuts ou la démocratie turbulente », Ludovic Frobert, Lyon, juillet 2017 ;

* « La révolte des canuts de Lyon », Christian Guyard, Herodote.net, 13 novembre 2019.

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